qqaḥraman-g˚ašˡeLe garçon Ryrsyzyko, Hatouroujouko–le-Manchot et Koupchi-Koupchi étaient trois princes, hommes de bien, qui habitaient le Caucase.Ils se disputaient les vertus d’un homme véritable et vivaient en émulation.Un jour, ils tinrent conciliabule et se mirent d’accord pour aller voler les juments du prince des Russes.Avant de se mettre à l’exécution de l’affaire qu’ils avaient projetée -- il y avait , parmi les hommes bien du pays un homme -- « que Detchiyimko Pchipiyi aussi nous accompagne ! », dirent-ils.Detchiyimko Pchipiyi était un noble Abzakh,mais c’était un homme valeureux qui excellait dans ce genre d’affaires.Ces quatre hommes se mirent donc en mouvement et ils partirent.Avant de se mettre à chasser les juments, ils s’assirent et se partagèrent la besogne.Koupchi-Koupchi n’était que guide.Même s’ils étaient entrés dans un pays totalement inconnu, ils auraient pu en revenir par où eux-même le voulaient.Koupchi-Koupchi dit : « Moi, à l’heure du lever du soleil, à l’heure aussi où la princesse Kahraman sort dans sa cour, je ferai de la sorte que vous arriviez devant sa maison.Là, les Cosaques qui nous poursuivront, nous rejoindront, eux aussi, juste à côté la mangeoire des chevaux de la princesse Kahraman » .Ainsi planifia-t-il son travail.La princesse Kahraman était la fille d’un prince Noghay.C’était une jeune fille célibataire que tout le monde dans le pays connaissait, et dont tous louaient la beauté.« Hatouroujouko ! Et toi, que feras-tu ? » demandèrent à Hatouroujouko les autres.Celui-ci leur répondit : « En ce qui me concerne, je raménerai les chevaux que nous allons chasser, sans laisser s’échapper ne serait-ce qu'un seul. »Quant à Ryrsyzyko, il dit : « Detchiyimko et moi, nous retiendrons et détournerons tout danger qui se présentera derrière nous » ; ainsi se partagèrent-ils le travail.Ils partirent donc la nuit, et ils se mirent à chasser devant eux les juments.Hatouroujouko dit à Detchiyimko : « Lorsque nous arriverons à la cour de la princesse Kahraman , laisse passer le premier Cosaque qui nous y rejoindra !Je lui ferai alors parcourir cent fois en rond la cour, ensuite, je le ferai tomber dans la mangeoire des chevaux de la princesse Kahraman. »L’affaire se déroula exactement comme l’avait prévu Koupchi-Koupchi .Le matin, pendant que le soleil se levait, ils arrivèrent à la cour de la princesse Kahraman.Pendant que ces quatre hommes passaient, la princesse Kahraman sortit aussi dans la cour, une jarre à la main.Au moment même où elle sortit, les Cosaques rejoignirent les quatre hommes.Lorsque la princesse Kahraman vit, l’un à la tête des chevaux, l’autre en train de rassembler les chevaux, les deux autres combattant les Cosaques,elle reposa la jarre et se mit à les regarder.A ce moment-là, la mère de la jeune fille sortit, elle aussi, dans la cour, et,voyant sa fille immobile, elle lui demanda : « Que regardes-tu ? »« Ne vois-tu pas ce que je regarde ? » lui répondit celle-ci et elle lui montra les combattants.La fille et la mère ne cessant de les regarder, Ryrsyzyko et Detchiyimko tuèrent là l’armée qui les poursuivait, et, ayant enlevé leurs chevaux aussi, ils revinrent.La femme du prince Noghay rentra dans la maison, pendant que son mari dormait encore.Celui-ci se réveilla, et réprimanda sa femme : « Eh ! où disparais-tu, ( à l’aube ) à une heure aussi matinale ! ? » dit-il.Et la femme de répondre : « Quatre hommes passaient par là, c’est eux que je regardais. »Et, lorsque le prince gronda : « Quatre hommes ! quelle importance ? » la femme lui répliqua :« Les quatre hommes qui habitent ce pays passaient par là, ce sont eux je regardais. »Le prince se mit en colère : « N’existe-t-il pas d’autres hommes que ces quatre-là, dans ce pays ? » demanda-t-il à la femme.« Si tu me le demandes, à moi, il n’en existe pas » dit celle-ci.A cette réponse, le prince se mit encore plus en colère, bondit de son lit et, lorsqu’il voulut attraper son sabre,sa femme lui dit : « On ne bat pas une femme avec un sabre.Les gens qui se battent avec un sabre, tu en verras, là, si tu dors dans la cour.A la rigueur, on peut frapper une femme avec un fouet, mais l’on ne frappe pas une femme avec un sabre ! » lui répliqua-telle.Le prince, se sentant insulté, sortit dans la cour et vit là l’armée que les autres avaient massacrée.Sans un mot, il rentra dans la maison, et, parce qu’il se sentait insulté, il fit atteler une voiture et renvoya sa femme chez le père de celle-ci.Quant à la princesse Kahraman , elle dit : « Je ne pourrai pas rester aux côtés d’un homme qui n’a pas plus de vertu que cela, en l’appelant ‘mon père’ », dit-elle, et elle partit avec sa mère.Après cette affaire, on a composé une chanson en l’honneur de ces quatre hommes.On mentionna, dans la chanson, les noms des trois princes, mais étant donné qu’il n’était pas prince, on n’y fit point figurer le nom de Detchiyimko Pchipiyi .Celui-ci ne survécut pas beaucoup à ces événements, car il contracta la variole dont il mourut à l’âge de soixante-quinze ans.A sa mort, on composa une complainte en l’honneur de Detchiyimko.Voici le refrain de la complainte qu’on a composée pour lui :« Une maladie d’enfant a eu raison d’un homme comme il n’en apparaît pas sur terre.Une maladie d’enfant a eu raison de celui que les Russes n’ont pu tuer avec le sabre pendant trente-sept ans. »